Gale de boue chez le cheval : ce qu'il faut savoir
Elle a fâcheuse tendance à resurgir chaque hiver, à la faveur des pluies très abondantes qui inondent les prés... La gale de boue vient abîmer les membres de nos chevaux malgré nos bons soins, et parfois les priver du pré ou du paddock pour les en préserver. La gale de boue : qu'est-ce que c'est exactement ? Zoom sur un souci de santé du cheval pas toujours simple à gérer...
La gale de boue : une dermatose multifactorielle complexe
La « gale de boue » est une expression courante pour désigner une dermatose inflammatoire du bas des membres du cheval, généralement localisée aux paturons et autour.
Contrairement à ce que son nom suggère, il ne s'agit pas d'une parasitose mais d'une dermatite bactérienne, parfois fongique, favorisée par l'humidité persistante.
Une pathologie favorisée par les conditions humides et boueuses
Les épisodes de gale de boue surviennent principalement en automne et en hiver, lorsque les sols sont détrempés et que les chevaux vivent en extérieur. L'humidité prolongée ramollit la peau, affaiblit la barrière cutanée, et ouvre la voie à des infections opportunistes, notamment :
- Staphylococcus spp.,
- Dermatophilus congolensis
- ou des levures du genre malassezia.
Des lésions caractéristiques et facilement identifiables
Les symptômes typiques :
- des croûtes épaisses,
- des gerçures douloureuses,
- une peau suintante,
- parfois une boiterie si l'inflammation est sévère.
Les atteintes sont souvent bilatérales mais asymétriques, et se concentrent sur les paturons, le bas du canon ou le talon. Dans les cas avancés, on observe un œdème marqué ou une cellulite ascendante.
Des facteurs individuels qui aggravent la sensibilité
Certaines races, comme les chevaux de trait ou à fanons abondants, sont plus exposées du fait de la moindre aération de la zone distale du membre. Les chevaux ayant une peau fine, des antécédents d’allergie ou une immunité altérée (par exemple après une maladie ou un stress chronique) présentent aussi un terrain plus sensible.
Une évolution en plusieurs stades
La dermatose évolue de manière progressive, d’une irritation cutanée bénigne à une dermatite suppurée douloureuse.
On distingue généralement trois stades :
- l’érythème (rougeur),
- la formation de croûtes,
- puis la phase suintante ou ulcérative.
Sans traitement adapté, elle peut se chroniciser, compliquant les soins et la récupération.
Gale de boue : un diagnostic par l’examen clinique
La gale de boue est en général diagnostiquée cliniquement, visuellement et au toucher. Toutefois, en cas de lésions persistantes ou atypiques, un grattage cutané, une culture bactérienne ou un examen fongique peuvent permettre de cibler le traitement et d’écarter d’autres diagnostics différentiels comme la teigne, la photosensibilisation ou une allergie de contact.
Un traitement local, ciblé et progressif
La prise en charge repose sur le nettoyage délicat de la zone atteinte, le séchage rigoureux, et l’application d’un antiseptique doux (chlorhexidine, povidone iodée diluée). Des crèmes à base d’antibiotiques topiques, de corticoïdes légers ou d’agents antifongiques peuvent être prescrites en fonction de la cause prédominante, et sous contrôle vétérinaire.
Les erreurs à éviter dans la prise en charge de la gale de boue
L’abrasion trop agressive des croûtes, l’usage de produits irritants (alcool, peroxyde) ou la macération prolongée sous des pansements occlusifs aggravent l’inflammation.
De même, le rasage des poils, souvent pratiqué par réflexe, peut fragiliser davantage la peau et retarder la cicatrisation.
Une prévention basée sur l’environnement et l’hygiène
La prévention de la gale de boue passe par une gestion rigoureuse des zones de vie du cheval. Un paddock bien drainé, des périodes de repos sur sol sec, et un nettoyage régulier des membres (suivi d’un séchage complet) limitent les conditions propices au développement des agents infectieux.
L’importance d’une vigilance renforcée chez certains chevaux
Les chevaux en pension au pré à l’année, les poulinières, chevaux âgés ou ceux souffrant de pathologies immunodépressives nécessitent une attention particulière. Un suivi hebdomadaire de l’état des paturons, surtout en période humide, permet de repérer les premiers signes et d’intervenir rapidement avant l’installation de lésions chroniques.
Le rôle des compléments et de la nutrition
Une peau saine commence aussi dans l’assiette. Des apports adaptés en acides gras essentiels (oméga-3 et -6), zinc, biotine, et vitamine E renforcent la barrière cutanée. En cas de récidives fréquentes, un ajustement nutritionnel peut être envisagé avec un vétérinaire ou un nutritionniste équin.
Les solutions naturelles et alternatives validées
Certaines huiles essentielles antifongiques et antibactériennes (tea tree, lavande, eucalyptus citronné) ont montré une efficacité modérée en application locale, mais doivent être utilisées avec beaucouo précaution pour éviter les réactions allergiques. L’argile verte, associée à des extraits de plantes, est parfois utilisée en phase de récupération pour apaiser et assécher la peau.
De façon générale : si certaines recettes naturelles ont fait leurs preuves dans certains cas, méfiez-vous des remèdes de grand-mère qui peuvent aussi parfois faire de sérieux dégâts.
Risque de chronicisation et complications de la gale de boue
Une gale de boue négligée peut évoluer vers des complications sérieuses :
- formation de tissu fibreux,
- pigmentation anormale,
- boiterie prolongée,
- voire lymphangite chronique.
Dans certains cas, une imagerie (échographie du membre) ou une biopsie cutanée sont nécessaires pour exclure des pathologies plus graves.
Une approche intégrée pour éviter les récidives
Le traitement ne suffit pas sans une gestion globale : qualité du sol, fréquence des soins, type de litière, adaptation du pansage, entretien du matériel de toilettage et révision des routines de travail doivent être réévalués pour minimiser les risques de récidive.
Gale de boue : une pathologie révélatrice de l'environnement
La gale de boue, si elle est souvent bénigne dans ses formes précoces, constitue un signal d’alarme sur la qualité de l’environnement, l’état immunitaire du cheval et l’attention portée à la routine de soins. Une approche experte, proactive, préventive et individualisée, reste la meilleure garantie de résolution durable.
Sources :
-
Scott & Miller, Equine Dermatology, Elsevier, 2011.
-
The Merck Veterinary Manual, 11th Edition, 2016.
-
OIE Bulletin on Equine Dermatitis, 2019.
-
IFCE – Institut français du cheval et de l'équitation (fiches vétérinaires).